jeudi 31 mai 2012

Motörhead - Ace of Spades


Du groove, de la crasse, du cambouis, du méchant plein de poils, du rock brut et brutal : Motörhead. Le heavy-metal n'aime pas les demi-mesures. Ceux-là ont choisi de jouer vite et fort, bien décidés à broyer leur audience sous une avalanche de décibels crachés (en pleine poire), notamment par la basse du chanteur-bassiste et fondateur du groupe, le grand, l'unique Lemmy Kilmister. Et comme il trouve sa basse un peu fade, qu'est-ce qu'il fait le Lemmy ? Il pousse le bouton 'overdrive' de son ampli, et il joue en accords. Un son bien lourd, limite crade, marque de fabrique du groupe qui accompagne à merveille sa voix éraillée d'alcoolique d'outre-tombe dopé aux amphétamines. 

C'est qu'il impose le respect le coco (qui a quand même eu le privilège d'être technicien de guitare pour Jimmy Hendrix à la fin des années 60). Même le petit Lars Ulrich (de Metallica, excusez du peu) le vénère et a un moment été président du fan club américain de Motörhead. Maintenant tu cires les santiags du monsieur, ou tu te prends sa Rickenbacker dans la tronche, ok ? Aujourd'hui, à 66 ans, Lemmy est une légende qui tourne toujours, boosté par les substances, "But that's the way I like it baby, I don't wanna live forever" comme il le hurle dans Ace of Spades.

Bienvenue dans un monde d'élégance et de
raffinement, bordel. Et pour faire pousser les poils,
mieux que Petrole Hahn, y'a Motörhead
Justement. En 1980, le trio anglais, qui n'en est pas à son premier fait d'armes ("Bomber" et "Overkill" sont passés par-là) et est devenu un des fers de lance de la New Wave of British Heavy Metal, débarque dans la décennie avec une grenade à fragmentation dégoupillée avec les dents: Ace of Spades. Premier contact : les têtes d'affreux qu'ils arborent sur la pochette de l'album. Faites rentrer les gosses, fermez les volets, ça va chier. La main sur la poignée de gaz et les guitares affutées au silex, c'est un missile bluesy et rock. Attention, pas de fioritures inutiles, on n'est pas là pour épépiner les groseilles à la plume d'oie.


If you like to gamble, 
I tell you I'm your man
You win some, lose some, 
it's - all - the same to me 



mardi 22 mai 2012

Rammstein - Links 2-3-4


De retour de Berlin, je vous ramène du gros, du lourd, du bourrin : du Rammstein. C'est l'occasion de parler d'un autre pays du métal, l'Allemagne, qui compte son lot d'adeptes du genre. Et qui en fournit un meilleur exemple que ceux qui en six albums studio sont devenus les meilleurs représentants de la Neue Deutsche Härte, la nouvelle scène métal allemande, et accessoirement le groupe chantant  en langue allemande le plus connu internationalement (ils ont même un astéroide à leur nom)? Car Rammstein chante en allemand. Selon le bassiste du groupe, Ollie Riedel, "l'Allemand est le langage de la colère" - ça plante le décor.

Fondé au début des années 90 sur les ruines du mur de Berlin, le groupe est révélé par la bande originale de "Lost Highway" de David Lynch, qui contient deux de leurs chansons. Portés par la voix gutturale de Till Lindemann, les morceaux intègrent notamment des éléments de heavy metal mais surtout d'"indus", un style utilisant des riffs répétés (voire répétitifs).  Le côté "bourrin" des morceaux ne doit cependant pas faire oublier (pour les germanophones) la relative finesse des paroles qui multiplient les jeux de mots et empruntent parfois à… Goethe!

Les économies d'énergie? Hein? Quoi?
Mais Rammstein, c'est aussi un style exubérant et une scénographie qui fait passer le 14 juillet pour un pétard mouillé. Les déguisements outranciers et la profusion d'effets pyrotechniques sont les deux mamelles de leurs shows au cours desquels le chanteur perd régulièrement ses sourcils et le public quelque uns de ses membres, évacués pour cause de chaleur excessive. D'après le guitariste Richard Kruspe, ces shows mélangent humour, théâtre et leur culture est-allemande. Un goût du "burlesque" (cuir et latex inclus!) qui leur a valu pas mal de controverses, dont une accusation de sympathies néo-nazies. C'est pour y répondre qu'ils composent "Links 2-3-4", dont le titre est une référence à une chanson ouvrière allemande, Einheitsfrontlied, écrite par Bertold Brecht, et qui exprime leur sympathie pour le parti de gauche Die Linke d'Oskar Lafontaine dont la phrase "das Herz schlägt links" est reprise dans le morceau :

Sie wollen mein Herz am rechten Fleck
Doch seh ich dann nach unten weg
Da schlägt es links


lundi 14 mai 2012

AC/DC - Highway to Hell

Assumer les étiquettes ? Revendiquer l'appartenance à un style, ou simplement faire de la musique ? Toute l'histoire du rock tourne autour de ce dilemme... AC/DC, comme tous les grands groupes, a choisi de se placer au-delà de ces débats de zoologues. Si leur musique présente toutes les caractéristiques du Hard Rock à l'état pur, aux accents blues et rock et qu'on leur prête volontiers une influence sur le développement du Heavy Metal, le groupe a toujours refusé une classification qu'il juge réductrice : leur musique, c'est du bon vieux rock'n roll bien bluesy, point barre.
Les frères Angus et Malcolm Young, deux guitaristes australiens d'origine écossaise sont le noyau dur du groupe, fondé en 1973.  Le rock aime les icônes : la silhouette d'Angus Young se repère à bonne distance : uniforme d'écolier en culotte courte, Gibson SG (reconnaissable à ses deux échancrures en forme de cornes), et "duck walk" (vous savez, cette façon de danser sur une jambe avec le manche de guitare en avant, à la Chuck Berry).


Brian Johnson ou Bon Scott ?
Deux époques pour AC/DC : les années 70 avec Bon Scott pour chanteur, mort tragiquement un soir de 1980 dans une Renault 5 (la classe!) suite à une soirée trop arrosée. Comme pour toute rock star qui se respecte, de multiples versions plus ou moins glamour circulent sur la cause de sa mort. Version officielle : il s'est étouffé dans son vomi. Le groupe qui se croyait fini recruta Brian Johnson pour le remplacer et dans la foulée sortit Back in Black,  qui reste à ce jour le plus gros succès commercial du groupe  (3e album le plus vendu au monde, toutes catégories confondues).

Highway to Hell donc. Le dernier album avec Bon Scott, un énorme succès, et une chanson titre qui est devenue un hymne du rock. Evidemment, avec un tel parfum de soufre dans le titre et sur la pochette de l'album (Angus Young avec des cornes et une queue), et l'absence de second degré de certains contemporains bienpensants aux aguets, les accusations de satanisme ne tardèrent pas à pleuvoir (avec une bonne publicité en prime). Les paroles sont bien anodines, les explications d'Angus Young toutes mignonnes ("when you are out on the road on a bus sleeping with a guy's smelly sock in your face, it's like you're on the highway to hell"). Quant à Malcolm, il a une bonne raison de ne pas être sataniste : "My mum would kill me for that!". Pour le reste, c'est du AC/DC classique, du rock sans fioritures : simple, direct, efficace et indémodable.

livin' easy
lovin' free
season ticket on a one way ride
askin' nothin'
leave me be
takin' everythin' in my stride


lundi 7 mai 2012

Offspring - Gotta Get Away



On fait un bond dans le temps et l'espace pour atterrir dans les années 90, avec un des albums qui a marqué la décennie : Smash, du groupe The Offspring, un petit bijou de post-punk énérvé qui résume bien ce courant qui colonise la côte ouest des US au milieu de la décennie. En 1994, tout adolescent(e) qui se respecte connait par coeur "Come out and play" ou "Self esteem", et l'album détient toujours le record du plus grand nombre d'albums vendus par un label indépendant (16 millions).


Eh oui, le punk, c'est toujours très classe!
Si le groupe, né dans les années 80 en Californie et dont c'est le troisième album, se tourne par la suite vers des influences plus pop, Smash intègre toutes les caractéristiques du punk : des mélodies simples et rythmées, une batterie omniprésente, des guitares bien saturées, une virulente critique de la société et un chanteur qui crie (beaucoup). The Offspring se réclame d'ailleurs des Sex Pistols et des Clash du côté du punk, mais aussi de Metallica ou Iron Maiden du côté heavy metal : les frontières entre les genres sont toujours poreuses!

"Gotta get away" est l'une des chansons les plus calmes de l'album - c'est dire - et illustre bien comment les bases jetées par les précurseurs du hard rock ont été intégrées 25 ans après Paranoid. On retrouve le riff de guitare qui concurrence le chant, les power chords, les hochements de tête (mais en 25 ans c'est devenu un poil plus violent, punk oblige!) et le mal-être existentiel :


Sitting on the bed
Or lying wide awake
There's demons in my head
And it's more than I can take




mardi 1 mai 2012

Black Sabbath - Paranoid



Toute introduction au Heavy Metal qui se respecte ne peut faire l'impasse sur Black Sabbath, fondé en 1968 à Birmingham, au coeur du berceau de la sidérurgie anglaise. Ce groupe a eu une influence déterminante sur l'évolution du genre Heavy Metal - dont il est souvent considéré comme le fondateur. Cette influence est autant due au jeu de guitare de Tony Iommi, inventeur du riff lourd et lugubre et accessoirement amputé de deux phalanges par une presse hydraulique lors de son passé d'ouvrier métallurgiste, qu'aux excentricités du chanteur Ozzy Osbourne "The Prince of Darkness" qui aujourd'hui encore reste une figure médiatique active malgré les ravages certains causés par l'alcool et diverses substances...


La sonorité grave et sombre si caractéristique de Black Sabbath est une conséquence directe de l'accident de Tony Iommi : pour soulager ses phalanges douloureuses (passons sur ses phases de fabrication de prothèses artisanales à base de plastique fondu provenant de bouteilles de détergent), celui-ci réduisit drastiquement la tension des cordes de sa Gibson SG abaissant ainsi l'accord d'un ton et demi ! Son handicap l'incita également à utiliser massivement les "power chords", accords simples basés sur la quinte - harmoniquement pauvres mais  d'une efficacité et d'une puissance redoutables sur des sons saturés dont ils révèlent la richesse de la distorsion. 

Paranoid, chanson issue de l'album éponyme (1970) est un classique de Black Sabbath. Tout y est : le riff de Tony, une exploration des côtés sombres de la nature humaine (leur principale source d'inspiration avec les thèmes occultes), le contraste de la voix claire d'un Ozzy encore frais mais avec un air déjà bien "dérangé". Head banging obligatoire!


Finished with my woman
'cause she couldn't help me with my mind
People think I'm insane
because I am frowning all the time